Coronavirus - Aide du Fonds de Solidarité : les précisions apportées par le Décret.
Invité mardi soir sur TF1, Gérald DARMANIN, Ministre de l'Action et des Comptes Publics annonçait que 95.000 petits entrepreneurs avaient d'ores et déjà déposé une demande d'aide sur la plateforme créée par le Gouvernement sur le site impots.gouv.fr. C'est dire si le décret précisant les conditions d'application de l'ordonnance prise dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire publiée au Journal Officiel en date du 26 mars 2020 !
Si le dispositif était d'ores et déjà globalement connu (voir notre dossier sur le sujet), les précisions contenues dans le décret demeurent importantes, en particulier pour les indépendants et les autoentrepreneurs dans la mesure où pour nombre d'entre eux, leur activité est un complément de retraite.
Qui peut solliciter l'aide de 1.500 € versée par le Fonds de Solidarité aux termes du décret d'application ?
Le Décret précise dès son préambule quels sont les acteurs économiques qui peuvent prétendre à l'aide du Fonds de Solidarité mis en place dans le cadre de la loi d'urgence sanitaire.
Quelles sont les conditions d'éligibilité à la prime de 1.500 € versée par le Fonds de Solidarité ?
Rien de nouveau quant aux principales conditions d'éligibilité au Fonds de Solidarité mis en place par le Gouvernement dans le cadre de la loi d'urgence sanitaire et financé par l'Etat, les Régions et les collectivités d'Outre-Mer (la Fédération des Assureurs ayant annoncé abonder à hauteur de 200 millions NDRL).
Quel que soit votre statut fiscal, entreprise, association, indépendant, personne physique, libéral... vous pouvez sollicitez l'aide du Fonds de Solidarité. Plusieurs conditions d'éligibilité sont cependant à remplir, comme nous l'évoquions dans notre précédent article.
Retour sur les conditions connues puisque figurant déjà dans l'ordonnance publiée au JO en date du 26 mars 2020.
Certaines conditions étaient d'ores et déjà connues, et semblaient permettre une très large sollicitation du Fonds :
- avoir débuté votre activité avant le 1er février 2020,
- ne pas avoir déposé de déclaration de cessation de paiement au 1er mars 2020,
- disposer d'un effectif de moins de 11 salariés (le seuil étant calculé selon les modalités de l'article L.130-1 I du code de la sécurité sociale),
- présenter un chiffre d'affaires sur le dernier exercice clos inférieur à 1 million d'euros (ou, pour les entités économiques n'ayant pas encore clos un exercice, de présenter un chiffre d'affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l'entreprise et le 29 février 202 inférieur à 83.333 €), étant entendu que le chiffre d'affaires s'entend comme le CA HT ou, lorsque l'entreprise relève de la catégorie des bénéfices non commerciaux, comme les recettes nettes HT.
- présenter au titre du dernier exercice clos un bénéfice imposable augmenté le cas échéant des sommes versées au dirigeant au titre de l'activité exercée au plus égal à 60.000 euros (pour les entreprises n'ayant pas encore clos un exercice, le bénéfice imposable augmenté le cas échéant des sommes versées au dirigeant est établi, sous leur responsabilité, à la date du 29 février 2020 sur leur durée d'exploitation ramené sur douze mois),
Voilà pour les conditions d'ores et déjà connues via le dossier de presse remis par le Gouvernement au lendemain de la publication au JO des 25 ordonnances adoptées lors du Conseil des Ministres exceptionnel du 25 mars 2020.
Mais le Décret recelait quelques surprises...
Les précisions contenues dans le décret d'application relatives aux conditions d'éligibilité au Fonds de Solidarité.
En effet, en sus des conditions précédentes, le Décret a précisé de nouvelles conditions d’éligibilité afin de bénéficier de l'aide de 1.500 € versée par le Fonds de Solidarité mis en oeuvre dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire il conviendra que :
- les personnes physiques sollicitant l'aide (artisans, indépendants, TNS, libéraux, ...), ou pour les personnes morales leur dirigeant majoritaire, ne soient pas titulaires au 01 mars 2020 d'un contrat de travail à temps complet ou d'une pension de vieillesse et n'aient pas bénéficié, au cours de la période comprise entre le 1er et le 31 mars 2020 d'indemnités journalières de la sécurité sociale d'un montant supérieur à 800 €,
- elles ne soient pas contrôlées au une société commerciale au sens de l'article L.233-3 du code de commerce (NDRL toute personne physique ou morale est considérée comme en contrôlant une autre dès lors qu'elle détient directement ou non une fraction du capital social lui conférant la majorité des droits de vote ; qu'elle dispose seule de la majorité des droits de vote en vertu d'un accord conclu avec d'autres actionnaires ou associés sans être contrôle à l'intérêt de la société, qu'elle détermine en fait par les droits de vote dont elle dispose les décisions dans les AG de cette société, qu'elle est associée ou actionnaire de cette société et dispose du pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance de cette société) ,
- si elles contrôlent un ou plusieurs sociétés commerciales au sens de l'article L.233-3 du Code de Commerce, ces entités respectent les seuils fixés relatifs au nombre de salariés, montant du chiffre d'affaires et du bénéfice imposable,
- elles ne soient pas en difficulté au 31 décembre 2019 au sens de l'article 2 du règlement UE n°651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.
Pourquoi le décret est-il venu préciser les conditions d'éligibilité au fonds de solidarité, excluant ainsi certains acteurs économiques (retraités, actifs, holding...) ?
On l'a clairement compris à la suite de la polémique créée par les propos du Ministre de l'Economie et des Finances Bruno LE MAIRE relative au conditionnement de l'aide de l'Etat au versement (ou non) des dividendes d'une entreprise : si le Gouvernement ne veut "laisser personne sur le bord de la route", il n'est pas question non plus de laisser un acteur économique jouer sur les deux tableaux et profiter du dispositif d'aide mis en place afin de lutter contre les conséquences économiques de la crise sanitaire.
Or, pour de nombreuses personnes physiques, les revenus issus de leur auto entreprise, micro entreprise, cabinet libéral, ... sont des revenus de compléments. On peut penser aux jeunes retraités qui continuent d'exercer en tant que consultant ou expert après la liquidation de leur retraite, aux salariés exerçant en parallèle de leur emploi une autre activité, soit pour arrondir leurs fins de mois, soit pour lancer leur activité en minimisant les risques (et oui : contrairement à une idée reçue, il peut être possible d'exercer une autre activité en parallèle de son CDI).
De même, il existe par exemple des sociétés dont l'objet social est précisément de contrôler et/ou d'animer d'autres sociétés : les holdings, qu'elles soient passives ou actives. Les effectifs de ces sociétés sont en général relativement réduits dans la mesure où elles n'exercent pas d'activité de production à proprement parler.
C'est ainsi que Bruno LE MAIRE a indiqué sur BFMTV dans une interview en date du 30 mars 2020 qu'il lui semblait intolérable qu'une société puisse dire " 'Je n'ai pas de trésorerie, j'ai besoin de l'Etat pour reporter mes charges' et en même temps 'J'ai de la trésorerie pour mes actionnaires' ”. En clair : le Ministre de l'Economie et des Finances s'est clairement positionné en indiquant qu'il était profondément inéquitable et choquant qu'un acteur économique puisse jouer sur les deux tableaux, en particulier compte tenu des conséquences dramatiques pour beaucoup de TPE et d'indépendants de la pandémie de coronavirus CODIV19.
Et c'est sans aucun doute la raison pour laquelle le Décret est venu préciser des conditions d'éligibilité au Fonds de Solidarité excluant de facto ce type de profil.
Comment est versée la prime de 1.500 € par le Fonds de Solidarité ?
Les aides financières versées au titre du Fonds de Solidarité sont versées sous la forme de subventions attribuées sur décision du ministre de l'action et des comptes publics aux acteurs économiques remplissant les conditions d'éligibilité dès lors qu'elles :
- ont fait l'objet d'une interdiction d’accueil du public intervenue entre le 1er mars 2020 et le 31 mars 2020 ,
- ou qu'elles ont subi une perte de chiffre d'affaires d'au moins 70% durant la période comprise entre le 1er mars 2020 et le 31 mars 2020 par rapport à la même période que l'année précédente, précisions étant apportées que
- pour les entreprises créées après le 1er mars 2019, on se référera au chiffre d'affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l'entreprise et le 29 février 2020,
- pour les personnes physiques ayant bénéficié d'un congé pour maladie, accident de travail ou maternité durant la période comprise entre le 1er mars 2019 et le 31 mars 2019, ou pour les personnes morales dont le dirigeant a bénéficié d'un tel congé pendant cette période, par rapport au chiffre d'affaires mensuel moyen sur la période comprise entre le 1er avril 2019 et le 29 février 2020.
Le Ministre de l'Action et des Comptes Publics a d'ores et déjà annoncé que les sociétés ayant formulé une demande d'aide sur la plateforme dédiée du site des impôts percevrait jusqu'à 1.500 € dans les 4 jours suivants leur demande. (pour la procédure, n'hésitez pas consulter notre article dédié).
Le Décret précise toutefois que les acteurs économiques "ayant subi une perte de chiffre d'affaires supérieure ou égale à 1 500 euros (percevront) une subvention d'un montant forfaitaire de 1 500 euros" tandis que les acteurs économiques "ayant subi une perte de chiffre d'affaires inférieure à 1 500 euros (percevront) une subvention égale au montant de cette perte".
A noter que dans le cadre du décret, la perte de chiffre d'affaires est "définie comme la différence entre, d'une part, le chiffre d'affaires durant la période comprise le 1er mars 2020 et le 31 mars 2020 et, d'autre part, le chiffre d'affaires le chiffre d'afffaires durant la même période de l'année précédente, ou pour les entreprises créées après le 1er mars 2019, le chiffre d'affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l'entreprise et le 29 février 2020, ou pour les personnes physiques ayant bénéficié d'un congé pour maladie, accident de travail ou maternité durant la période comprise entre le 1er mars 2019 et le 31 mars 2019, ou pour les personnes morales dont le dirigeant a bénéficié d'un tel congé pendant cette période, le chiffre d'affaires mensuel moyen sur la période comprise entre le 1er avril 2019 et le 29 février 2020."
Comment percevoir l'aide supplémentaire de 2.000 € ?
Le Décret précise que pour bénéficier de l'aide supplémentaire de 2.000 €, il faudra au jour de la demande (les conditions étant cumulatives) :
- bénéficier du premier volet de l'aide jusqu'à 1.500 €,
- employer au 01 mars 2020 au moins un salarié en contrat à durée indéterminée ou déterminée,
- se trouver dans l'impossibilité de régler les dettes exigibles dans les trente jours suivants,
- s'être vu refuser une demande de prêt de trésorerie d'un montant raisonnable faite depuis le 1er mars 2020 auprès de sa banque habituelle, ou demeurer sans réponse depuis au moins 10 jours après une telle demande.
Pas d'innovation donc, l'objectif de cette aide complémentaire étant clairement de soutenir les plus petits acteurs économiques afin de préserver l'emploi et éviter les faillites en cascade.
Les demandes seront instruites individuellement par les régions qui étudieront en particulier "le caractère raisonnable du montant du prêt refusé, le risque de cessation des paiements et son lien avec le refus de prêt".
Jimmy PINTO
Président
AXECIBLES,
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