Harcèlement sexuel : comment les victimes peuvent se défendre ? Le point sur la loi.
Harcèlement sexuel : comment est-il défini par la loi ?
Le harcèlement concerne évidemment "toute forme de pression grave, même non répétée, dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte sexuel, au profit de l'auteur des faits ou d'un tiers". C'est à cette forme de harcèlement, plus brute, que l'on pense. Mais ce n'est pas la seule.
L'article L1153-1 du Code du Travail rappelle que le harcèlement sexuel est un délit caractérisé par "le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle" qui "portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant" ou créent "une situation intimidante, hostile ou offensante".
Evoquer dans un SMS ou une conversation le "joli décolleté" d'une collègue, multiplier les blagues ou commentaires sexistes ou afficher une photographie de femme nue dans un bureau est constitutif de faits de harcèlement par exemple.
Procédure pénale ou procédure civile, que choisir ?
Le harcèlement sexuel est un délit pénal avant d'être une faute en droit du travail. Par conséquent, une victime de harcèlement sexuel en entreprise peut attaquer de deux façons : en lançant une procédure au pénal et/ou en attaquant devant le Conseil des Prud'hommes.
En 2014, 1048 plaintes ont été déposées au pénal. Sur ces 1048 plaintes, seules 65 ont donné lieu à des condamnations, dont la moitié se sont soldées par un simple rappel à la loi. La plainte pénale est un parcours du combattant depuis le dépôt de plainte jusqu'au prononcé de la sanction, étant entendu au surplus que la charge de la preuve repose sur la victime elle-même.
Devant le Tribunal de Prud'hommes, le harcèlement est généralement le contexte d'un licenciement. La procédure est en général plus facile puisque les juges facilitent souvent la preuve pour la victime. Il ne s'agit pas de prouver les faits de harcèlements, mais de démontrer la simple possibilité du harcèlement. La nuance est d'importance.
Dans une affaire de harcèlement, tout est question de preuve en effet. Aux audiences, il est rare que l'auteur du harcèlement reconnaisse les faits. En général, il nie en bloc ou minimise les faits en invoquant un malentendu, une blague, voire même une situation de séduction initiée par la victime elle-même.
Quelles sont les preuves qui doivent être rapportées ?
Dans les cas de harcèlement, la preuve est libre. On dit qu'elle peut être apportée "par tous moyens" : SMS, emails, messages sur les réseaux sociaux type Facebook par exemple. La réponse de la victime demandant à l'auteur des faits de cesser son comportement renforce d'autant plus ce type de preuves. Il est cependant parfois difficile aux victimes de réagir, en particulier lorsqu'elles sont dans une position de dépendance économique ou craignent pour leu poste.
Le témoignage de collègues ayant vécu ce type de situation (par exemple de salariés ayant quitté l'entreprise) ou assisté à des scènes de harcèlement, de même que des certificats maladie sont également admissibles.
Peut-on enregistrer son agresseur sans son accord ?
Au civil, le principe est celui de la légalité de la preuve. Par conséquent, un enregistrement réalisé sans le consentement de l'autre partie peut être écarté. Il n'empêche qu'en pratique, il est difficile pour un juge de ne pas tenir compte d'un enregistrement une fois qu'il l'a entendu en audience...
Au pénal, les choses sont différentes puisque tous les coups sont permis... ou presque.
Victime ou témoin... qui prévenir dans l'entreprise ?
En général, la procédure à suivre est rappelée dans le règlement intérieur de l'entreprise. A défaut, il ne faut pas hésiter à s'adresser au comité d'entreprise, aux membres du CHSCT ou au médecin du travail.
En effet, le dirigeant est responsable de la sécurité de ses salariés, tant physique que morale ou mentale. Par conséquent, c'est au chef d'entreprise de mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires pour éviter que puissent se produire les situations de harcèlement, ou, à défaut, pour les identifier, les faire cesser et les sanctionner le plus rapidement et le plus efficacement possible (art. L.4121-1 du Code du Travail). S'il ne le fait pas, ou insuffisamment, la victime des faits de harcèlements pourra engager une procédure contre son employeur devant le Conseil des Prud'hommes ou le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale (TASS).
Enfin, et c'est sans doute la solution la moins connue, le défenseur des droits peut être saisi. Il s'agit d'une institution publique, une institution constitutionnelle indépendante, qui peut enquêter au sein d'une entreprise et se révèle très souvent un allié objectif et efficace.
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