La discrimination au travail
La discrimination au travail possède une part majeure des cas de conflits au travail.
La discrimination est l’acte de défavoriser une personne sur la base d’un motif tel que le sexe, l’âge, la religion ou encore l’état de santé. Le fait de discriminer quelqu’un est illégal et pénalement répréhensible. La discrimination peut intervenir à tout moment de la vie, y compris (surtout) au travail. Quelle définition donner à la discrimination ? Y a-t-il des différences de traitement autorisées ? Que faire en cas de discrimination ? Les réponses ci-dessous.
La discrimination : qu’est-ce que c’est ?
La Loi du 27 mai 2008 portant sur diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations vient distinguer et définir deux types de discrimination : la discrimination directe et la discrimination indirecte.
Discrimination directe
Ainsi, une discrimination est “directe” dans la situation où une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aurait été dans une situation comparable .
L’article 1 de la LOI n° 2008-496 du 27 mai 2008 nous donne une liste de 23 critères de discrimination :
Âge | Etat de santé | Opinions politiques | Apparence physique | Vulnérabilité résultant de la situation économique |
Sexe | Handicap | Activités syndicales | Nom | Capacité à s'exprimer dans une langue autre que le Français |
Origine | Caractéristiques génétiques | Opinions philosophiques | Moeurs | Domiciliation bancaire |
Identité du genre | Orientation sexuelle | Perte d'autonomie | Lieu de résidence | Grossesse |
Situation de famille | Croyances, appartenance, non appartenance à une religion | Appartenance/non appartencance à une ethnie ou une nation |
Discrimination indirecte
La discrimination indirecte est moins explicite.
Neutre en apparence, elle résulte d’une disposition/d’un critère/d’une pratique qui, sur la base d’un des critères évoqués ci-dessus, désavantage une personne par rapport à une autre .
Interdiction de la discrimination
Principe général de non-discrimination
Prévu aux articles 1132-1 et suivants du Code du travail, ainsi qu’aux articles 225-1 et suivants du Code pénal.
La discrimination est interdite. Les articles sus-cités prévoient notamment l’application du principe de non-discrimination dans le cadre du travail, et ce dans de nombreuses situations : l'embauche d'un nouveau salarié, lelicenciement d'un salarié, le renouvellement d'un contrat, la mutation oupromotion à un autre poste en interne, le salaire et toutes les formes de rémunération , laformation, le reclassement, ou les tâches confiées.
Qui est protégé contre la discrimination ?
L’interdiction de discrimination intervient aussi bien à l’encontre des salariés, que pour les stagiaires ou les apprentis.
Comment dénoncer une discrimination au travail ?
Protection accordée au salarié qui dénonce une discrimination
De prime abord, l’article 3 de la loi du 27 mai 2008 indique qu’ “Aucune personne ayant témoigné de bonne foi d'un agissement discriminatoire ou l'ayant relaté ne peut être traitée défavorablement de ce fait. Aucune décision défavorable à une personne ne peut être fondée sur sa soumission ou son refus de se soumettre à une discrimination”.
Ainsi toute personne qui serait susceptible d’être au courant d’une situation de discrimination dans son entreprise doit en parler, elle sera protégée et ne pourra faire l’objet d’aucune sanction.
Différents moyens de dénoncer une discrimination
Une situation de discrimination peut être dénoncée de différentes façons :
- Dénonciation du salarié concerné ou de l’un de ses collègues,
- Saisir le défenseur des droits,
- Saisir l’inspection du travail,
- Droit d’alerte des représentants du personnel,
- Action en justice d’une organisation syndicale.
Le travailleur qui subit une discrimination peut aussi privilégier d’autres moyens d’action comme la médiation (qui suppose l’intervention d’un médiateur), la transaction (document issu d'un accord entre le salarié et l'employeur, qui met fin à un litige sans attendre un jugement) ou encore par une procédure participative (les parties tentent de trouver une solution amiable à leur différend et sont assistées par des avocats).
Preuve de la discrimination
Pour ce qui est de prouver une situation de discrimination, l’article L1134-1 du code du travail énonce la règle de preuve. Par principe, en droit, la preuve doit être apportée par la personne qui demande (le demandeur). Pour autant, dans le cadre de la discrimination, il a été aménagé un régime de la preuve “spécial”.
L’individu (salarié, candidat, stagiaire…) qui prétend être victime d’une discrimination doit présenter au juge des éléments de faits qui laisse supposer l’existence d’une discrimination (directe ou indirecte). La simple présomption d’une discrimination par le juge oblige la partie défenderesse à prouver la non-discrimination.
Si le juge a un doute sur l’existence de la discrimination, la partie qui se défend (exemple : l’employeur) devra prouver l’objectivité de sa décision.
Licenciement discriminatoire
Tout licenciement reposant sur une cause discriminante sera annulé et le salarié réintégré. S’il refuse, la décision de licenciement ne sera pas annulée, le salarié aura alors des dommages et intérêts du fait du préjudice subi. Ces indemnités ne sont pas soumises aux barèmes instaurés par les ordonnances du 22 septembre 2017.
Dans la même idée, toute disposition ou clause prise par l’employeur sur la base d’un motif discriminatoire est nulle. Idem pour les sanctions disciplinaires et les dispositions conventionnelles (accord collectif, convention collective).
Quand peut-on parler de discrimination au travail ?
Les situations de discriminations avérées
Il y a discrimination dès lors que l’employeur utilise d’autres éléments que ceux liés au travail pour prendre ses décisions quant à un contrat de travail. Cette situation peut être prise en compte dès l’entretien d’embauche et ce, jusqu’au licenciement. Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet de mesure ayant pour motivation une discrimination.
Tout auteur de discriminations encourt une peine de prison pouvant aller jusqu’à 3 ans d’emprisonnement une amende qui, elle, peut s’étendre jusqu’à 45 000 euros pour les personnes physiques et 225 800 euros pour une personne morale.
Les situations de discriminations positives
En effet, il existe des situations en apparence discriminantes, et pourtant, elles ne seront pas reconnues comme telles. Ainsi, il est possible d’effectuer une discrimination dite positive. Il s’agit de favoriser certains groupes de personnes victimes de discriminations systématiques pour rétablir l’égalité des chances. Les femmes ( L1142-4 du code du travail) et les travailleurs handicapés (L1133-4 du code du travail) peuvent faire l’objet d'une discrimination positive.
Les mesures prises et qui sont justifiées par des éléments objectifs, sont donc légales. Tout comme les mesures qui répondent à une exigence professionnelle essentielle et déterminante ( L1133-1 du code du travail). Par exemple, certaines activités peuvent être expressément réservées à une femme ou un homme : artiste, mannequin, modèle...
Illustrations de cas de discrimination
La Chambre sociale de la Cour de Cassation s’est prononcée à de nombreuses reprises sur des cas de discrimination au travail.
- Un restaurant gastronomique avait licencié un salarié pour le port de boucles d’oreilles. La lettre de licenciement évoquait notamment : “votre statut au service de la clientèle ne nous permettait pas de tolérer le port de boucles d’oreilles sur l’homme que vous êtes”. Il s’agit d’une discrimination basée sur l’apparence physique et le genre. Cass. Soc, 11 janvier 2012.
- L’employeur, lors d’un questionnaire d’embauche, avait posé la question “Avez-vous des affiliations syndicales ?”. Discrimination basée sur l’appartenance à un syndicat. Cass, Crim. 13 mai 1969.